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 Dossier - Août / Septembre 2012

Des circuits de chauffage de plus en plus techniques


Patrick Carré, président du Synasav Edito

"Il faut prévoir l’entretien de l’installation dès sa mise en service"

Aujourd’hui, dans une construction neuve, à la mise en service, le nettoyage et rinçage du circuit et l’utilisation de produits sont absolument nécessaires. Sans cela, les problèmes peuvent s’installer au niveau des échangeurs, privant l’utilisateur d’eau chaude sanitaire, ou une installation neuve peut se boucher en moins d’une année. Une eau qui circule moins bien, un matériel entartré, et ce sont les performances de l’ensemble qui diminuent, privant l’utilisateur des économies d’énergie qu’on lui a vendues.
On éviterait par la suite de nombreux litiges si l’entretien était ainsi correctement anticipé. Les installations ne seront pérennes que si elles sont entretenues. C’est un point qu’il faudrait inclure dans les devis dès le départ.
Les entreprises de maintenance et de services en efficacité énergétique constatent que les problèmes sur les circuits de chauffage, souvent liés à l’entartrage, l’embouage ou la corrosion, deviennent de plus en plus fréquents lorsqu’il n’y a pas eu d’entretien.
Jusqu’à présent, les chaudières avaient des corps de chauffe suffisamment gros pour encaisser sans trop de gêne une perte de rendement. Si les chaudières ont évolué vers des performances accrues, cela se traduit par des corps de chauffe plus étroits, une tuyauterie de faible diamètre, mais aussi, et par voie de conséquence, une plus grande sensibilité au moindre problème sur la circulation ou sur la qualité de l’eau. Les matériels actuels ne fonctionnent pas avec des installations inadéquates.
À l’arrivée prochaine des garanties de consommation, ce manque de prise en compte de la qualité de circulation d’eau dans le circuit de chauffage va déboucher sur des procès et des expertises des installations. L’utilisateur va vouloir trouver un responsable du non-respect des consommations énergétiques qui étaient prévues.
La maintenance, qui se trouve tout en bout de chaîne, encaisse toutes les conséquences de ces absences d’actions dès la mise en service. Alors que des actions simples peuvent inverser la donne. Certaines de nos entreprises l’ont expérimenté : en effectuant un désembouage dès qu’il y a une intervention sur le circuit, pour changer un appareil par exemple, le nombre de pannes ultérieures est divisé par deux. Meilleure circulation de l’eau, économies d’énergie mais aussi fonctionnement plus silencieux de la chaudière : les avantages sont nombreux.
Une façon de faire qui risque d’être un peu longue à mettre en place, mais qui va être nécessaire pour la filière.

Patrick Carré, président du Synasav
(Syndicat National de la Maintenance et des Services en Efficacité Énergétique)

 


Des circuits de chauffage de plus en plus techniques


Alors que chaudières et émetteurs de chaleur voient leurs performances évoluer, le reste du circuit de chauffage doit s’adapter. Il participe lui aussi au bon fonctionnement de l’installation et à sa sobriété en termes de consommation énergétique. Dans ce dossier, un focus sur quelques-uns des éléments qui le composent et permettent son entretien.

 

Wilostratos pico

Avec l’arrivée de la RT2012 et la baisse de la consommation énergétique des bâtiments, l’accent a été mis, dans un premier temps, surtout sur les performances des chaudières et l’utilisation des énergies renouvelables. Mais au fur et à mesure que les générateurs de chaleur progressent, certaines consommations annexes, qui semblaient mineures auparavant, prennent de l’importance. C’est le cas des moteurs des circulateurs et pompes, qui font l’objet d’un changement de réglementation avec la directive ErP (voir encadré).
« Le circulateur joue un rôle prépondérant dans un circuit de chauffage, il en est même le troisième élément capital », explique Jean-François Goulet, directeur général de Wilo. « Beaucoup de personnes se posent des questions sur les chaudières, mais considèrent que le circulateur n’est qu’un bout de tuyau alors que l’installation d’une pompe haut rendement permet de passer d’une puissance de 60 W à 7 W en moyenne », renchérit Valérie Layssac, responsable marché domestique & merchandising de Grundfos.

 

 


Une directive pour moins consommer
Voulue par les constructeurs, la directive ErP (Energy related Products - 2009/125/CE) s’applique aux produits consommateurs d’énergie durant tout le cycle de vie, depuis leur conception et leur fabrication jusqu’à leur fin de vie. Dans le domaine du chauffage, sont notamment concernés les circulateurs et les pompes, au niveau du moteur et de l’hydraulique.
Une première étape a déjà été franchie en juin 2011 : les moteurs des pompes de 0,75 à 375 kW doivent être d’indice IE2 (International Efficiency, qui remplace l’ancien marquage EFF, l’actuel IE2 équivalant à l’ancien EFF1). Au 1er janvier 2015, les moteurs devront afficher un indice IE3 ou être IE2 associé à une variation électronique de la vitesse.
Pour les circulateurs, la prochaine étape est très proche : le 1er janvier 2013. Ils devront alors avoir un EEI (Energy Efficiency Index, qui remplace l’étiquetage énergétique) inférieur à 0,27, ce qui correspond au label A actuel. Au 1er août 2015, cette valeur limite de l’EEI descendra à 0,23.



D’où la naissance de la directive ErP qui rendra obligatoire au 1er janvier 2013 les circulateurs de classe A. À l’approche de cette échéance, les fabricants sont prêts. « Cela fait trois ans que nous nous préparons, commente Jean-François Goulet. Cela a été un gros bouleversement en termes de recherche et développement et cela a nécessité des investissements importants, de l’ordre de 55 millions d’euros pour notre usine de Laval ». Des changements industriels, valables pour tous les fabricants, qui étaient nécessaires pour adapter les chaînes de fabrication aux nouveaux moteurs à aimant permanent qui équipent désormais pompes et circulateurs.


Grundfos ALPHA2Même si les circulateurs à haut rendement seront obligatoires à partir de janvier 2013, il reste encore un travail de terrain pour expliquer aux installateurs la mise en œuvre des produits et surtout les accompagner pour la vente de ces produits qui sont plus chers que les précédents.
« La notion de retour sur investissement est importante, explique Valérie Layssac. La durée d’amortissement d’un circulateur tel que l’Alpha 2 est de 2 à 4 ans selon la typologie du circuit, en prenant en compte un euro et un coût de l’électricité constants. En réalité, c’est encore plus rapide. C’est un argument qu’il faut arriver à mettre en avant ».
Salmson Priux HomePour convaincre les installateurs, des programmes de formations et d’informations ont été mis en place. « Notre travail est d’expliquer l’intérêt de ces produits au-delà du fait qu’ils seront obligatoires. Nous avons des programmes d’accompagnement, des services dédiés et des outils comme des tables de références d’interchangeabilité », explique Hella Joudi, responsable marketing de Salmson. Le fabricant a organisé au cours de l’année deux réunions de distributeurs et trois road-show pour les artisans.

 

 

 

Radiateurs : têtes et robinets thermostatiques plus évolués pour plus d’économies
DanfossLes fabricants se penchent également sur les têtes et robinets thermostatiques, éléments de contrôle de la température, pour permettre aux utilisateurs de réaliser des économies d’énergie. L’électronique sert à piloter plus finement le chauffage radiateur par radiateur, avec parfois la possibilité de faire une programmation groupée. Danfoss a sorti récemment deux têtes thermostatiques électroniques : living eco, qui agit de manière autonome, et living connect qui peut en plus fonctionner en liaison avec une unité centrale. « Grâce à la régulation PID, ces modèles commencent à se fermer dès que la température approche le point de consigne », explique Éric Fauconnier, responsable marketing de Danfoss. Pour l’utilisateur, cela se traduit par une température plus stable et donc une consommation d’énergie moindre. Dans une installation équipée de plusieurs modèles living connect, chaque tête thermostatique devient un point de mesure de la température qu’il transmet à la régulation, pour un contrôle précis et pièce par pièce du chauffage.


L’utilisation de l’électronique permet également de programmer finement les radiateurs. Une fonction que l’on retrouve dans la gamme e-senso de Comap, compatible avec la totalité des vannes thermostatiques de la marque, et donc utilisable en rénovation. La programmation se fait directement à partir de la tête, à l’aide d’une clé USB radio qui propose des programmes types via un ordinateur, ou à partir d’un thermostat mural radio.


TA HydronicsTA Hydronics propose l’E-Pro, un boîtier qui vient s’intercaler entre le robinet et la tête thermostatique. Compatible avec les robinets de la marque Heimeier, ce boîtier peut être programmé de façon journalière ou hebdomadaire. Dans le cas de bâtiments équipés de boîtiers sur plusieurs radiateurs, le stick E-Pro, une clé USB, facilite la fonction de programmation : celle-ci est réalisée sur ordinateur via un programme fourni par TA Hydronics, puis transférée sur le stick avant d’être transmise au boîtier E-Pro. Ce principe de programmation par clé USB se retrouve également chez Somatherm, avec econnect, une tête électronique programmable qui se branche sur les corps thermostatiques de différentes marques grâce à des adaptateurs.


Autre manière d’économiser l’énergie : limiter la plage de température d’utilisation. « En effet, les utilisateurs ont tendance à se servir d’une tête thermostatique comme d’une tête manuelle, et a monter la température de consigne pour chauffer plus vite alors que non seulement ce n’est pas efficace, mais cela consomme plus », explique Samuel Sonet, responsable technique et prescription d’Oventrop. L’idée est donc de bloquer de manière mécanique les températures minimale et maximale. Sur le modèle Uni LH d’Oventrop, cela se réalise à l’aide de clips. L’utilisateur peut naviguer entre les deux températures, aura le confort qu’il désire mais sans consommer plus que nécessaire. « Ces écoclips n’étaient pas très recherchés il y a quelques années mais aujourd’hui, de plus en plus de bureaux d’études demandent le réglage de cette plage de températures, afin d’obliger les utilisateurs à y rester. C’est un filet de sécurité », commente Samuel Sonet. Cette limitation de plage se retrouve sur la gamme Senso de Comap, des têtes à sondes intégrées, que le fabricant annonce comme compatible BBC.
Le fabricant Oventrop a également travaillé sur les robinets thermostatiques, avec les séries AV6 et RF qui possèdent plusieurs positions de réglage de débit. « Dans un circuit classique, il n’y a pas de limitation de débit au niveau des radiateurs, explique Samuel Sonet. Avec ces corps de robinets, l’idée est de n’amener que la quantité d’eau nécessaire à chaque radiateur : pour les premiers radiateurs sur le circuit de chauffage le passage d’eau peut être réglé plus petit que celui des radiateurs qui sont à l’extrémité du circuit. De plus, ces robinets thermostatiques sont indispensables pour faire une régulation zone par zone ».

 

Un entretien suivi pour assurer l’efficacité
FernoxAvec l’évolution des matériels, la qualité de l’eau devient essentielle. Auparavant, une chaudière au corps de chauffe conséquent encaissait un embouage de l’eau sans problème, aujourd’hui, ce n’est plus possible avec des matériels à la taille calculée au plus juste. « Le diamètre des tuyaux a diminué, le réseau utilise une multitude de matériaux qui se corrodent entre eux et les rendements des chaudières vont jusqu’à 109 %. Il faut donc que la qualité d’eau suive », constate Bruno Savalle, responsable commercial et technique de Fernox France. « L’effet d’une dégradation du réseau est immédiat sur le rendement, en particulier en cas de production d’eau chaude sanitaire. 1 mm de tartre entraîne 10 % de surcoût d’énergie consommée car il a tendance à s’installer au niveau des points chauds, donc sur l’échangeur, là où justement il est le plus gênant », renchérit Sophie Chaix, chargée de développement des activités collectif et produits formulés de Cillit. Ce qui peut poser des problèmes à l’heure où on parle de plus en plus d’une garantie sur les consommations annoncées. « Si une installation n’est pas entretenue, les performances se maintiennent six mois, puis elles commencent à se dégrader », annonce Sophie Chaix.
Les actions à mener sont au nombre de trois : éviter la formation de tartre ; régler la dureté de l’eau pour protéger l’aluminium ; éviter les boues. Selon les cas, il existe des solutions chimiques ou   mécaniques, voire une combinaison des deux. « Ce sont le plus souvent des solutions simples à mettre en œuvre et qui évitent des problèmes par la suite », souligne Sophie Chaix.
L’installation d’un adoucisseur (Permo, Cillit, Talassa par exemple) va être efficace pour combattre le tartre. Mais sur des immeubles en petit collectif, c’est un budget qui peut rencontrer des réticences. Pour répondre à ce marché, Cillit à mis au point Solutech remplissage, une station mobile pour l’appoint et le remplissage de circuits fermés. Mobile, facile à transporter, cet appareil peut servir au remplissage de plusieurs sites, pour lesquels il stabilise le pH de l’eau et évite l’entartrage des réseaux. Cet appareil vient en complément de la gamme de traitements simples et polyvalents Solutech, et d’un filtre qui se pose au niveau du retour sur le circuit, filtre l’eau, retient boues et particules magnétiques, et sert de sas d’introduction des traitements. Quand le tartre est installé, son élimination passe par l’utilisation de produits tels que Duonett D7 de Climalife ou DS-3 de Fernox.


FlamcoPour éviter les boues, nombre d’installations sont équipées de pots à boue ou de filtres, comme TF1 de Fernox ou les modèles Flamco Clean de Flamco. « Les séparateurs de boues ont vraiment connu un fort développement ces dernières années, constate Franck Pépin, chef des ventes de Flamco. Les installations récentes sont plus sujettes à l’embouement. En revanche, il n’y a pas un intérêt marqué pour la fonction de dégazage, assurée par la gamme Flamco Vent. Les installateurs restent peu sensibilisés sur le sujet. Pourtant, quand une installation est correctement dégazée, la formation de boue est beaucoup moins importante ».
Une fois le réseau emboué, le nettoyage peut être réalisé au moyen d’une pompe de désembouage, comme Santaure Flush, de Permo, ou Jetflush4 et Jetflush junior de Sentinel. Ces fabricants proposent en complément des produits qui vont aider à l’élimination du tartre et inhiber la corrosion.

Corinne Montculier

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